Blue Whale Challenge

Blue

Comment sensibiliser, faire de la prévention et gérer l’attirance des jeunes pour ce challenge de 50 défis dangereux qui déferle sur les réseaux sociaux.

Après, les jeux dit d’évanouissements, il y a quelques années, voilà qu’est proposé aux jeunes, via les réseaux sociaux, le Blue Whale Challenge.
Chacun est invité à effectuer un défi par jour qui, réussi et validé via photo à l’appui, donne droit à effectuer le défi suivant.
Si les premiers sont bien anodins, les suivants le sont beaucoup moins comme le «Ice and Salt» (mettre du sel sur la peau puis d’y ajouter un glaçon tout en tenant le plus longtemps possible malgré la douleur provoquée par les engelures), se scarifier l’avant bras, se couper les lèvres….
Le dernier de la liste étant radical puisqu’il s’agit de se donner la mort. C’est d’ailleurs de là que vient le nom de ce challenge morbide, les baleines bleues étant réputées pour s’échouer volontairement sur les plages pour mourir.

Comment parler aux jeunes des défis dangereux lors desquels ils mettent leur vie en danger ? Cela peut-il les inciter à le faire et obtenir ainsi l’effet inverse ? En tant qu’animateur dans un milieu de vie des jeunes, comment faire face ?

Il y a quelques années, le SDJ avait pu participer à une journée consacrée aux phénomènes des jeux à risque chez les ados au cours de laquelle ceux-ci avaient été abordés selon trois angles : la sensibilisation – la prévention – l’intervention de crise.

Une bonne base à se rappeler avec la venue de ces challenges Internet.

Sensibiliser les adultes qui accompagnent les jeunes

Pour mieux prévenir, il faut d’abord et avant tout comprendre. Il est alors important que les animateurs de jeunes puissent :

S’informer

Que sait-on des jeunes qui pratiquent ces jeux/défis, de leurs profils, de leurs motivations ? Où et comment les pratiquent-ils ? Quelles sont les conséquences de ces pratiques ?…
De nombreux sites peuvent nous informer et nous confronter à une réalité qui bouscule bien souvent nos croyances.

Retenons par exemple que :

  • les plus addicts sont des jeunes âgés de 12-15 ans;
  • les jeunes qui pratiquent sont en général bien dans leur peau et bien intégrés à tous niveaux, plein de vie et de projet et l’expression d’un comportement suicidaire est exceptionnelle;
  • comme son nom l’indique, c’est avant tout, pour eux, un jeu, et donc considéré comme un amusement susceptible, dans certains cas, de procurer des sensations inédites;
  • ces jeux sont proposés d’un groupe d’ados à l’autre, par le «bouche à oreille» ou par sites, blogs, vidéos transmises par les téléphones portables, réseaux sociaux, …;
  • les plus jeunes y voient la découverte d’une expérience nouvelle et l’abordent en toute inconscience;
  • les plus âgés, eux, cherchent surtout à relever un défi (vivre le risque, pouvoir maîtriser les limites de son corps, appartenir à un groupe en montrant qu’on peut répondre positivement au t’es cap ou pas cap ?) et à vivre des sensations fortes.

Repérer chez les jeunes les signes, les indices de telles pratiques

Repérer chez un jeune certains signes physiques.
Un changement d’attitude ou des questions lancinantes sur la mort ou le sentiment de toute puissance sont des indices à ne pas négliger.

Poser dans son groupe un cadre sécurisé et sécurisant

Cela consiste notamment à :

  • proposer des jeux adaptés (où la violence est donc proscrite et où le dépassement de soi prend une autre forme que se mettre en danger physique);
  • avoir une attention bienveillante de ce qui se passe dans le groupe;
  • proposer des lieux de paroles réguliers où jeunes et adultes pourront librement parler de ce qu’ils voient et vivent.

Encourager (former) les adultes à la prévention

Ne pas faire de prévention, c’est laisser les jeunes dans l’ignorance des dangers, les laisser à la merci d’une incitation à y jouer. De l’avis de tous les experts, une bonne prévention n’incitera nullement les jeunes à essayer… Qu’on se le dise !

Une bonne prévention, ça se passe en quatre temps forts :

1. Parole aux jeunes
Les jeunes sont invités à s’exprimer librement (donc sans l’intervention des adultes) sur :

  • ce qui peut les mettre en danger de manière générale;
  • les situations de danger ressenties comme agréables ou non;
  • la notion de plaisir que provoque le fait de jouer en se mettant en danger;
  • les jeux auxquels ils jouent (on comprendra aisément que poser la question A quoi jouez-vous ? est une démarche bien différente que de poser la question Connaissez-vous tel ou tel jeu ?).

2. Conséquences et risques
Chacun (adultes et jeunes) participe à une réflexion sur les conséquences de ces pratiques. On peut notamment s’appuyer sur des témoignages de victimes ou proches de victimes (les jeunes y sont en général très sensibles) et ce, en les invitant ou en se procurant textes ou vidéos.

3. Position des adultes
Les jeunes ont pris connaissance des risques et des conséquences et même si les adultes sont conscients que le choix leur appartient, ils se doivent de donner leur avis. Repartant de la parole des jeunes mais aussi des risques et conséquences évoqués, les adultes définiront leurs limites d’acceptation en tant que responsables du groupe dont les jeunes font partie (école, mouvement,…).
Cela revient à définir ce que l’on peut appeler les « plaisirs stop » :

  • STOP aux plaisirs qui riment avec danger car nous voulons vous voir vivants;
  • STOP aux plaisirs qui riment avec destruction de l’autre car nous voulons vous voir sociables et bienveillants;
  • STOP aux plaisirs qui riment avec esclavage car nous voulons vous voir libres.

4. Engagement mutuel
Chacun est invité à s’engager personnellement et collectivement.
Du côté des jeunes
Eveillés aux dangers, ils peuvent facilement et rapidement comprendre leurs responsabilités d’informer d’autres jeunes. C’est donc l’occasion de leur proposer des actions de prévention envers leurs pairs au moyen de divers modes de communication (affiches, théâtre, articles, chansons, débats,…).
Au-delà de la prévention, ils peuvent aussi être conscients de leur rôle dans l’assistance d’une personne en danger et par conséquent, agir quand ils voient ce genre de pratiques ou encore informer les adultes de ce qu’ils voient en prenant conscience que parler, c’est protéger et non pas dénoncer.
Du côté des adultes

  • créer un groupe de personnes ressource(s) volontaires qui s’engagera à être à l’écoute des alertes lancées par les jeunes;
  • créer des espaces/temps de parole dans la durée;
  • se former de manière permanente et être une équipe opérationnelle en cas de drame.
  • se mettre en projet spécifique, être visible, communiquer son travail au sein de son institution, demander les services des ressources extérieures mais aussi s’offrir des occasions de «souffler» et de se retirer.

Et si le drame survient ?

Le risque zéro n’existe pas. Un jeune faisant partie du groupe peut donc avoir tenté d’aller jusqu’au bout des challenges et être hospitalisé ou encore aller jusqu’au bout en y trouvant a mort.
Les adultes doivent agir !
Cette action peut être gérée par une équipe de personnes-ressource(s) existante ou formée pour l’occasion.
L’important, c’est :

  • d’être disponible pour écouter les jeunes (provoquer une rencontre si nécessaire) et en priorité les proches de la victime – frères et sœurs, meilleur(e)s ami(e)s, groupe dont il fait partie (classe, patrouille, …);
  • d’avoir un bulletin de santé régulier si la victime est hospitalisée et, d’en informer le groupe, de le rassurer;
  • de désigner un intermédiaire pour faire le relais avec les autorités policières s’il y a enquête et définir clairement le rôle de chacun;
  • d’avoir un porte-parole chargé des relations extérieures (vers les parents des jeunes du groupe mais aussi les services de presse souvent friand d’informations);
  • de créer, si nécessaire, un mémorial pour permettre aux jeunes de s’exprimer et de se souvenir;
  • de laisser la possibilité de s’exprimer encore et encore et bien après le drame.