Héberger le Christ
La plateforme citoyenne nous invite sur son site à retrouver l’humanité qui vit en nous, par le biais de la solidarité, de l’amitié et du partage. Au-delà des questions légales, ce sont beaucoup d’injustices et de questions humaines qui sont exposées sur le groupe Facebook hébergement. Récemment, une participante, convaincue du bienfondé de l’action se demandait s’il fallait en témoigner et si oui comment ? Les réponses entrent étrangement en résonance avec la foi, mais la bousculent également.
Imaginons un instant que la question, plutôt que d’être “je suis hébergeuse, dois-je en parler?” soit, “je suis chrétienne”. Quelques réponses fonctionnent dans les deux cas, qu’elles soient affirmatives ou négatives :
— Je ne le cache pas.
— Il ne faut pas le cacher c’est une fierté !
— N’ayant aucun compte à rendre à personne, je n’en parle avec personne non plus.
— En parler suscite le soutien des uns et des questions pour les sceptiques
— Moi, je m’en fiche et je l’affiche [au sens propre].
— J’en parle à mes proches et collègues en espérant qu’ils tentent aussi.
— C’est le quotidien de ma famille, donc forcément ça fait partie de nos conversations.
Et puis, viennent des affirmations que les chrétiens d’Europe ne connaissent pas, mais bien d’autres dans le monde :
— Un voisin ne me dit même plus bonjour depuis qu’il le sait.
— Je déteste me taire… mais nous devons être prudents.
— Pour moi, ce serait une mise en danger.
— Je pensais pouvoir en parler librement et puis […]
Mais ce qui est bien différent, entre dire être hébergeur et dire être chrétien c’est le témoignage. Pour ceux qui hébergent et qui osent inviter des amis, la confrontation est directe, provoquant la rencontre et l’échange.
— On aime avoir des invités, ça permet de parler de la situation des migrants et de mettre un visage sur des gars dont les médias parlent toujours négativement. En les voyant autour d’un repas, ça permet de sensibiliser nos amis à la cause.
— Je montre mon mur où il y a les photos de tous ceux qui sont passés. Quand certains voient leurs bouilles, ils sont surpris. Ces jeunes garçons et filles, ce sont les migrants dont on entend parler et qu’on laisse se noyer dans la mer !
Et comme chrétiens, une simple invitation pour un repas chez nous, servira-t-elle de témoignage ? Nos amis verront-ils le Christ à notre table ? Sans doute pas car s’attribuer sa présence serait indéniablement la perdre. Nul ne peut s’enorgueillir d’être chrétien. Cependant, s’il nous est plus difficile de témoigner que les hébergeurs, comme eux, nous pouvons faire de la place à notre table. Il n’est pas improbable que le Christ vienne frapper à la porte sous les traits de l’étranger, du petit, de l’esseulé.