Abus sexuel mieux vaut prévenir

Les abus sexuels et moraux ont existé au sein de l’Église et existent encore, nous le savons désormais que trop bien. Nous savons aussi que le problème est entre autre structurel. S’il faut donc encore travailler au niveau ecclésial, nous relevons dans cet article ce qui concerne plus spécifiquement votre animation de terrain en pastorale des jeunes sur base du rapport CIASE (Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église). Il est indispensable de mettre en place des mécanismes de protection contre les abus. Ne pas le faire serait irresponsable, d’autant plus que certaines dispositions sont simples à mettre en œuvre.

Attitude de base

La première chose à laquelle nous invite le rapport est de reconnaitre que les abus existent. Il est nécessaire de laisser une place pour la parole de chacun. Si le sujet est tabou, vous risquez de passer à côté d’une situation problématique sans pouvoir y mettre un terme avant que les conséquences ne deviennent irréparables. Ne tardez jamais à réagir.

Si, selon le droit canon, « le secret de la confession ne souffre aucune exception », mais le droit canon n’empêche pas des poursuites judiciaires pour non-dénonciation de crimes sexuels. Par ailleurs, pour la commission aucun secret ne devrait aller à l’encontre de la protection de la vie et de la dignité de la personne. La question est d’autant plus prégnante quand elle concerne des violences infligées à un mineur ou à une personne vulnérable.

Les abus ne sont pas un problème secondaire : ce qui fait notre Église, ce sont des personnes, pas la structure. Il est donc important de donner aux jeunes une place de sujets détenteurs de droits et de savoirs (et non pas seulement de récepteurs de la doctrine). Quand il est malheureusement trop tard, il est nécessaire de donner un vrai espace de reconnaissance et de parole aux victimes.

En équipe

Dans la constitution de vos équipes, privilégiez le partage d’opinions, le droit au désaccord, la multiplicité. Ce pluraliste régule les risques d’abus de pouvoir. N’ayez pas peur des tensions que cela pourrait créer entre une représentation hiérarchique de l’Église et le désir de synodalité. Si un minimum d’organisation est sans doute nécessaire, il est important d’éviter la concentration des pouvoirs entre les mains du seul pasteur. Cela ne signifie évidemment pas que vous devez prendre le pouvoir. Cela ne fera que déplacer le problème. Assurez-vous donc que votre équipe soit formée de manière variée. La théologie ne suffit évidemment pas pour s’occuper de jeunes. Intéressez-vous aux sciences humaines, au développement et à l’affectivité des enfants, aux droits, à l’importance de l’esprit critique, aux questions d’autorité et d’obéissance. Pour les séminaristes, cela signifie une part conséquente de formation « hors les murs ».

Il va de soi qu’aucun membre ne peut avoir d’antécédents judiciaires ou un profil psychologique problématique avéré. Il est sans doute nécessaire de se renseigner un minimum notamment sur d’éventuelles réponses négatives données à des postulants.

Dans le quotidien

Évitez l’isolement d’un mineur. Il ne peut y avoir de confusion entre une chambre et un parloir. Vous devez connaitre les obligations légales, et ne jamais hésiter à faire appel à un expert pour échanger sur des situations ambiguës ou à risque. Ayez aussi un référent pour échanger sur vos situations ; un espace de réflexion et de prise de recul régulier sur vos pratiques permettant une vigilance en continu sur des questions sensibles (contact physique, horaire et lieu d’un échange avec un jeune, modalités de la prise de rendez-vous…).

N’attendez pas que le travail soit mené depuis la tête des diocèses et des instituts religieux. Vous pouvez très concrètement dans les paroisses, lieux de célébration, de partage et d’échange, mettre ne place des cellules d’écoute locales, de discuter de mesures de prévention à développer et d’identifier toutes les formes d’abus de pouvoir. Ces initiatives ne doivent pas être des mises en cause personnelles. Au contraire, il s’agit de fortifier la confiance entre clercs et laïcs. Néanmoins, il devient évident que la survalorisation et la mise en surplomb du prêtre en particulier constitue un risque. Cela vaut en général pour toute forme de charisme. Tout l’équilibre est de parvenir à prévenir les risques sans dénaturer les rapports humains.

Pour éviter les dérives, il est important de faire la distinction entre la responsabilité de gouvernement et l’accompagnement spirituel. L’Église parle de for interne et de for externe. Distinction aussi entre le domaine de la morale de celui du droit. En outre, il s’agit de faire advenir le jeune dans un vis-à-vis et non pas de le dominer.

Un but

Dans toutes les formes d’enseignement, il s’agit d’exercer la conscience critique en toutes circonstances. Les Évangiles donnent l’exemple d’une parole comme dynamique, non pas de pouvoir sur l’autre, mais de volonté de le faire grandir et advenir, rappelant que, comme
dans un échange humain reposant sur des bases saines, la parole ne doit être prise que pour être donnée.

La profanation la plus grave est celle des personnes

Regardez bien cette image. Elle est confuse.
On y voit une main.
Mais cette réalité en cache une autre, celle de la victime.